Hérésie du désir
Silencieuse sous la vieille lampe,
vous n’êtes plus qu’une ombre à l’agonie,
un visage en lambeaux, un corps alité
tristement disloqué dans la morve du crépuscule
Le drap qui fait des vagues immobiles,
sanglantes, est un fleuve charriant les cadavres.
Et ce regard verdâtre, et ce regard livide
qui flotte dans l’eau blanche du miroir,
je l’ai en horreur, je voudrais qu’il cesse
à l’instant même de me harceler
par ses reproches muets, par ses noirs regrets.
Lorsque ce soir, vous aurez cessé d’exister,
je le promets, j’aimerai votre fantôme, votre divinité,
oh ! plus que je ne vous ai jamais aimée !
Mais à présent, l’assassin doit finir son œuvre :
vous voir mourir de belle mort.
Vos mains de squelette tremblent lamentablement.
Elles veulent m’étreindre ; hélas il est trop tard !
Car déjà en filigrane, derrière votre figure pâle,
déjà, sous les dorures sombres de l’alcôve,
à l’endroit où jadis nous nous enlacions,
votre spectre apparaît, plus suave que l’aurore,
rougeoyant soleil, sinistre et sensuel.
Ivre de désir, en lui je reconnais
la voluptueuse, l’infernale, la volcanique,
ange et vampire de mes rêverie érotiques.
Impérieuse, elle me fait signe de la rejoindre
dans les brumes de l’au-delà.
A elle, je donnerai mon âme,
à vous ma lame,
et au diable mon salut.
Adieu Madame,
nous ne nous verrons plus.
LF